Mettre des images de mon présent sur les mots de ton passé,
Subtile manière de ranimer ta voix,
de raviver ton souvenir,
de retrouver furtivement la chaleur de ta présence.
Tu n'es plus qu'un fantôme.
Je doute parfois de ton existence.
De l'existence de cette voix,
son rythme, sa gravité, sa tendresse. Sa rudesse.
Ces mots.
Je lis tes mots.
Ils me rassurent.
Ils raniment ta voix.
Tes mots me rassurent.
Ils consacrent ton existence.
À travers, je devine tout ce que je ne sais pas de toi.
Ton odeur, ta démarche, ta peau. Ton regard, ta gestuelle.
Les traits de ton visage s’effacent.
J'invente un autre toi,
presque morcelé, presque fragmenté.
J'invente un autre toi,
tout entier.
ls parlent de toi, alors,
Je les aime.
Je les répète,
les murmure à voix haute,
les hurle à voix basse.
Je les aime.
Ils sont beaux.
Un miroir sur ton monde.
Je suis heureuse, heureuse de les découvrir, heureuse de,
te découvrir.
J'en pleure.
Je les trouve beaux, et leur beauté me fait pleurer.
Ils sont beaux parce qu'ils parlent de toi.
Ils parlent d'un autre toi.
Celui que tu caches.
Ils sont beaux,
et parce qu'ils sont beaux,
et parce qu'ils sont toi,
j'aimerai les chérir.
Maladroitement,
j’aimerai les graver, les figer,
parce qu’ils s’agitent en moi,
ils bouillonnent,
ils me brûlent.
J’ai peur qu’ils me consument.
J’ai peur de leur puissance.
Je les aime parce qu’ils parlent de toi.
Je les aime parce qu’ils parlent de moi,
du corps fier et usé de mon père,
du regard désoeuvré de mon cousin,
de la rancoeur dissimulée de mon frère.
Ils parlent de ces hommes.
Ces hommes que j’aime.
Je les aime parce qu’ils parlent de toi.
De ton passé.
Je les aime parce qu’ils parlent de moi,
De mon présent.
Ils parlent de ces jeunes.
Ces jeunes qui habitent vingt-sept heures de ma semaine.
Ces jeunes que j’oublie le reste du temps.
Ils parlent de toi.
Toi, qui habites la constance de mes pensées.
Toi, que je n’arrive pas à oublier le reste du temps.
Toi.
enta / انت
(poème d’après le texte de N.E.-F. “Dans des brumes de peine et d'espérance", 2021.)
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